Pour un continuité de revenus des artistes-auteurices

 

Audition de la Ligue à l’Assemblée Nationale
– 11 septembre 2025 –

La Ligue se réjouit de l’invitation de Soumya BOUROUAHA, députée de Seine-Saint-Denis, et de Camille GALLIARD-MINIER, députée de l’Isère, à participer à une table-ronde à l’Assemblée Nationale sur la mise en place d’une continuité de revenus pour les artistes-auteurs. Nous sommes aux côtés de sept autres structures du secteur du livre, et nous réaffirmerons notre soutien à cette proposition de loi ô combien importante pour les artistes-auteurs.

Merci à notre déléguée syndicale, Elodie TORRENTE, d’y représenter la Ligue et merci également à Mesdames BOUROUAHA et GALLIARD-MINIER, rapporteures de la mission flash, pour cette invitation.

Deux lois, un objectif clair

Pour rappel, après avoir été initiée par l’ancien député, Monsieur Pierre Dharréville, la proposition de loi visant à l’instauration d’un revenu de remplacement pour les artistes-auteurs temporairement privés de ressources a été déposée le 15 octobre 2024 par Madame la députée Soumya Bourouaha. Deux semaines plus tard par un autre texte de la sénatrice Monique de Marco, le 31 octobre 2024, rédigé dans le même état d’esprit. Ces deux textes, très proches et soutenus par l’intersyndicale des artistes-auteurs, proposent de reconnaître l’ensemble des auteurs, issus de tous les secteurs de la création, comme des professionnels à part entière.

Les motifs exposés dans les deux textes sont très proches. Celui de la députée souligne que : « Les signataires de cette proposition veulent reconnaître le travail que constitue ce geste de création et le protéger », reconnaissant aussi qu’un « mouvement est en train de grandir dans le monde de la culture et de la création, pour une meilleure reconnaissance de celles et ceux qui demeurent par trop invisibles ». Celui de la sénatrice relève que « malgré leur travail socialement indispensable et leur apport non négligeable à l’économie de la nation, les artistes auteurs ne bénéficient pas des mêmes droits sociaux que les autres travailleurs ».

Les parlementaires y font le constat que les artistes-auteurs en tant que travailleurs ne sont pas rémunérés pour leur travail en tant que tel, et ne tirent l’essentiel de leurs ressources que de l’exploitation de leurs œuvres par des diffuseurs : « Le travail de création, qui est la phase antérieure à la diffusion, n’est généralement pas rémunéré ».

En cas d’absence d’activité rémunérée, l’artiste‑auteur ne reçoit donc aucune ressource autre que les minima sociaux. Le travail de création, qui est la phase antérieure à la diffusion, n’est généralement pas rémunéré. La députée propose donc de « corriger cette injustice, qui touche des dizaines de milliers de créateurs et de créatrices essentiels à la vie artistique, culturelle et intellectuelle de notre pays, et qui pèse sur son déploiement » et entend leur garantir un filet de sécurité comparable à celui des intermittents du spectacle. Une continuité de revenus serait alors possible en intégrant les artistes-auteurs à la caisse commune de l’assurance chômage.

Pour ouvrir leurs droits, les bénéficiaires devraient justifier d’un revenu annuel minimum équivalent à 300 heures. L’allocation mensuelle envisagée s’élève à 85 % du Smic net, soit environ 1 200 euros, une aide essentielle pour garantir un minimum vital. Le financement de cette mesure serait assuré par une augmentation des cotisations des diffuseurs, et donc des éditeurs, passant de 1,1 % à 5,15 %.

Une Mission flash commune sur la mise en place d’une continuité de revenu pour les artistes-auteurs

La mission flash a donc été mise en place pour évaluer les difficultés spécifiques des artistes-auteurices au regard de cette protection insuffisante, afin de dessiner ensuite les voies d’une continuité de revenus susceptible de sécuriser leurs parcours professionnels.

La Ligue des auteurs professionnels, représentée par Élodie Torrente, a mis en lumière une situation de précarité structurelle touchant les artistes-auteurices. Les revenus sont non seulement faibles – 75 % des auteurs percevant moins de 10 000 euros par an – mais aussi discontinus, ce qui rend impossible toute projection professionnelle stable. La précarisation est renforcée par l’absence de statut professionnel protecteur, la surproduction éditoriale, la concurrence exacerbée, ainsi que l’irruption des intelligences artificielles génératives.

Les dispositifs existants sont jugés insuffisants et inadaptés. Les aides publiques se concentrent sur les échelons régionaux et sont critiquées pour leur manque de transparence. Les modes de rémunération actuels partagent un même défaut : aléas, retards de paiement, dépendance vis-à-vis des éditeurs. L’à-valoir, pratique contractuelle sans base légale, illustre ces déséquilibres : il constitue une « obole » aléatoire, ne rémunérant ni le temps de travail réel ni l’investissement intellectuel de l’auteur et fige les auteurices dans une position de débiteur vis-à-vis de leur éditeur.

Les propositions sont intéressantes parce qu’elles visent la mise en place d’une véritable assurance chômage adaptée au caractère indépendant du travail des artistes-auteurs, financée par une réévaluation de la contribution des diffuseurs (passant de 1,1 % à 5,15 %), aujourd’hui largement insuffisante.

La Ligue insiste sur la nécessité de conférer aux artistes-auteurs un statut de travailleur indépendant à part entière, intégrant la protection sociale générale, et de renforcer leur légitimité par des élections professionnelles.