Organisé du 13 & 14 mars 2020 au Labo de l’édition à Paris, ce premier Hackathon a rassemblé pendant 24 heures des avocats, des juristes, des universitaires, des spécialistes en propriété intellectuelle, en droit social, en droit du travail, en droit des contrats… une vingtaine d’experts qui ont travaillé sans relâche avec des auteurs et autrices bénévoles. Le but ? Réinventer ensemble la protection des artistes-auteurs. Consacrées principalement aux secteurs que les organisateurs connaissent le mieux, à savoir le livre et de l’audiovisuel, ces réflexions concernent cependant bien l’ensemble du régime artistes-auteurs et ont vocation à être élargies.
Ce Hackathon 2020 était co-organisé par les Jeunes Universitaires Spécialisés en Propriété Intellectuelle (JUSPI), l’Institut des Sciences Sociales du Travail de l’Ouest (ISSTO), la Guilde française des scénaristes, la Ligue des auteurs professionnels, la Charte des auteurs et illustrateurs jeunesse et les États Généraux de la Bande Dessinée.
Il était structuré en trois ateliers :
Construire un contrat d’édition équitable :
Construire le contrat d’édition équitable proposé par la Ligue dans le document remis à la mission Bruno Racine1. Programmer un outil en ligne accessible à tous les auteurs pour leur permettre d’évaluer leur contrat d’édition.
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Réinventer le droit des relations collectives :
Trouver des solutions concrètes pour permettre aux associations et syndicats d’auteurs d’être plus forts à la table des négociations.
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Lutter contre le non-recours aux droits sociaux :
Aider les auteurs à comprendre leur régime social et lutter contre un problème majeur : le non-recours aux droits sociaux, en créant des outils pour simplifier leurs démarches administratives et juridiques.
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Atelier 1 – Construire un contrat d’édition équitable
Après des mois de travail, la Ligue des auteurs professionnels est heureuse de vous dévoiler un modèle de contrat d’édition équitable. Son utilisation est gratuite pour tous les auteurs et autrices, dans une volonté de démocratisation de pratiques plus justes.
Ce contrat d’édition équitable est le fruit du travail d’une vingtaine d’avocats, juristes et universitaires spécialisés en droit de la propriété intellectuelle et en droit du travail dans le cadre du Hackathon 2020. Cet événement était coorganisé avec la Charte des auteurs et illustrateurs jeunesse, les États Généraux de la Bande Dessinée, la Guilde Française des scénaristes, l’Institut des Sciences Sociales du Travail de l’Ouest et les Jeunes Universitaires Spécialisés en Propriété Intellectuelle. L’ensemble du groupe de travail a étudié de nombreux contrats d’édition type et a jugé que ces derniers étaient très majoritairement déséquilibrés, quand certaines clauses n’étaient pas tout simplement illégales. Faute d’accords-cadres réellement protecteurs pour l’heure, nous mettons à disposition cet outil pour soutenir les auteurs et autrices individuellement dans la négociation avec les maisons d’édition.
Rééquilibrer le rapport de force :
Si traditionnellement, c’est la maison d’édition qui envoie le contrat d’édition construit par son service juridique, un auteur ou une autrice peut tout à fait envoyer son propre modèle de contrat d’édition. Les agents littéraires n’hésitent d’ailleurs pas à rédiger leurs propres contrats sur-mesure pour leurs clients.
Comprendre les différentes cessions de droits :
Ce contrat d’édition équitable est pour une version imprimée de l’œuvre. Trop souvent, les contrats d’édition type impliquent la cession de tous les droits. Or, chaque cession de droit a une valeur. Les auteurs et autrices doivent être plus éclairés sur le périmètre des droits cédés.
Négocier à partir d’une base équilibrée :
Ce contrat d’édition équitable est une base de négociation. Le contrat d’édition que vous envoie une maison d’édition est négociable au gré à gré. Ce contrat d’édition est évidemment discutable entre vous et la maison d’édition, selon les cas de figure. Néanmoins, cette base contractuelle vous permettra de voir de façon lisible les changements demandés.
Préserver l’intérêt des auteurs et autrices :
Ce contrat d’édition équitable est une recommandation de la Ligue des auteurs professionnels. N’hésitez pas à vous appuyer sur cette recommandation : notre organisation professionnelle a pour objectif de défendre la profession.
Le contrat d’édition équitable sera suivi d’autres outils et d’autres travaux pour aider à rééquilibrer le rapport de force entre les auteurs, les autrices et les entreprises publiant leurs œuvres. À suivre !
Atelier 2 – Réinventer le droit des relations collectives
Qu’est-ce qu’un artiste-auteur ? La représentativité professionnelle, c’est quoi ? Comment accéder à des accords collectifs pour encadrer nos conditions de travail ? Qui représente nos professions auprès des pouvoirs publics ? Comment sont prises les décisions qui engagent la profession ? La représentation professionnelle est au cœur des préoccupations actuelles de nos métiers.
Le rapport Racine porte en lui toutes les mesures pour reconfigurer la protection des artistes-auteurs. Hélas, la volonté politique n’est pas pour l’heure à la hauteur de ce formidable projet. Alors comment réagir ? En faisant ce que les auteurs font le mieux : créer. Voici aujourd’hui les résultats de l’atelier “Réinventer le droit des relations collectives des artistes-auteurs.”
Le but était de réfléchir et trouver des solutions concrètes pour permettre aux organisations professionnelles d’artistes-auteurs de construire une représentativité professionnelle légitime et d’être plus fortes à la table des négociations collectives.
Reconnue comme un principe général du droit applicable à l’ensemble des relations collectives du travail par le Conseil d’État, la représentativité confère deux prérogatives principales :
- Signer des conventions et accords susceptibles d’extension
- Siéger dans les commissions paritaires.
La représentativité des artistes-auteurs n’a jamais été questionnée par le secteur de la création ou les institutions. Il en ressort que les artistes-auteurs, soit 270 000 personnes en France, ne se sont jamais appropriés la notion de « démocratie sociale ». Cela s’explique en partie par la construction historique du régime social des artistes-auteurs et par le fait que les niveaux de représentation de ces derniers sont difficiles à appréhender.
Encore aujourd’hui, la question d’un statut professionnel propre aux artistes-auteurs questionne et de nombreux artistes-auteurs alertent les pouvoirs publics sur un problème majeur : ils ne sont pas représentés.
Voici le résultat de cet atelier :
Atelier 3 – Lutter contre le non-recours aux droits sociaux
La Ligue des auteurs professionnels est heureuse de proposer un dossier spécial pour aider tous les artistes-auteurs à repérer les bons interlocuteurs lorsqu’ils se consacrent professionnellement à leur activité de création. L’objectif est de lutter contre un phénomène particulièrement marqué dans le domaine de la création : le non-recours aux droits sociaux.
Les problèmes d’information et de traitement de la demande sociale soulèvent la question majeure du non-recours aux droits sociaux. On distingue traditionnellement deux formes de non-recours aux droits sociaux.
- Soit les personnes éligibles ne demandent pas une prestation et donc ne la reçoivent pas.
- Soit les personnes éligibles demandent une prestation, mais ne la reçoivent pas.
Différentes raisons expliquent ce phénomène : il s’agit d’un problème de non-connaissance du droit ou d’un problème de non-proposition (le droit n’étant pas “activé” par l’agent prestataire malgré l’éligibilité du demandeur) ou d’un découragement des éventuels bénéficiaires face à la complexité du dispositif à actionner. Ce problème fondamental invite à considérer le non-recours comme un indice du manque de légitimité des politiques publiques. Souvent les normes sont “hors sol”, car élaborées sans la contribution des usagers, ce qui participe à les rendre inapplicables.
Au delà de ces normes, c’est la structure hyper-sectorisée du régime social qui doit être remise en cause. Si les artistes-auteurs ont souvent des pratiques multi-créatives, ils sont appréhendés par le prisme de « branches » dans lesquelles ils sont souvent « enfermés ». Or, cette vision sectorielle constitue un obstacle majeur à la reconnaissance d’un statut professionnel unique et fort et elle multiplie à tort les dispositifs spécifiques allant parfois jusqu’à rompre l’égalité entre les artistes-auteurs ou desservir leurs accès à leurs droits élémentaires, en raison de complexités inutiles qui n’apportent pourtant pas une protection spécifique.
Cette approche sectorielle est basée sur l’idée discutable et pourtant répandue que l’écrivain n’a strictement rien à voir avec le sculpteur et le scénariste. Et à ce titre, la protection sociale des artistes-auteurs est très fragmentée : ils cotisent pour un régime social divisé en cinq branches professionnelles gérées – pour l’instant – par deux organismes agréés qui n’ont plus la compétence du recouvrement laquelle a été transférée à l’Urssaf Limousin. De plus, ils contribuent à une caisse de retraite complémentaire (l’IRCEC) laquelle gère trois régimes de retraite complémentaire (RACD, RAAP et RACL) ! En résumé, si nous ne nions pas les singularités propres à certains créateurs, cette approche sectorielle les divise au point de les priver d’une identité commune, d’un accès simple à leurs droits et d’un véritable statut professionnel.
En outre, cette multiplicité des organismes ne facilite pas la compréhension du régime. La dégradation depuis plusieurs années des conditions économiques et sociales et l’appauvrissement progressif des artistes-auteurs largement affaiblis par cette crise sanitaire doit inviter les instances à réfléchir à une réforme complète du régime pour que celui-ci soit facilement appréhendé par les artistes-auteurs.
Le présent dossier vise donc à renforcer la protection des intérêts professionnels des artistes-auteurs en apportant des outils pratiques pour les aider dans la mise en œuvre de leur protection sociale.